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Discours de M. Georges Kevorkian

L'amicale AGASM Minerve, amicale des sous-mariniers du Finistère, a co-organisé avec l'association Aux Marins, en présence des forces sous-marines, une cérémonie du souvenir au Mémorial national de la pointe Saint-Mathieu.

Un reportage complet de cette cérémonie, fait par l'AGASM  est visible en cliquant ICI

 

Dans le cénotaphe M. Georges Kevorkian, de l'AGASM Minerve
a prononcé un discours dans lequel il retrace retracé le déroulement de l'événement

 

La Minerve ne reviendra plus

A l’occasion de cet hommage que nous rendons aux sous-mariniers, victimes de la perte corps et biens de la Minerve, il y a 50 ans, nous devons avoir une même pensée pour nos camarades disparus dans des conditions analogues.

 

Nous sommes à l’îlot Castigneau de l’arsenal de Toulon, le vendredi 26 janvier 1968, il est un peu plus de 7 heures du matin. Je m’attarde à l’angle des quais Isabelle et Laubeuf, car la Minerve s’apprête à larguer ses amarres pour rejoindre le secteur qui lui a été fixé, au large du Cap Sicié, où elle doit participer durant le week-end à un exercice de lutte anti-sous-marine avec un Breguet-Atlantic. Le poste de combat de vérification, conduit par l’officier en second, vient de se terminer. Le commandant, dans son manteau de mer, en haut du massif, fait un tour d’horizon ; les abords sont dégagés, il est prêt à appareiller.

 

Soudain, je vois apparaître au bas du massif, le lieutenant de vaisseau Jean Agnus, l’ingénieur du bâtiment, qui, après avoir mis le pied sur le quai se dirige vers moi et me dit « Monsieur Kévorkian, nous avons des ennuis de fuites d’air sur les compresseurs Girodin, pourriez-vous me fournir quelques joints toriques ? ». Sans perdre de temps pour chercher à comprendre, je vais rapidement dans nos ateliers quérir dans nos réserves un assortiment de joints et le lui remet. Quelques minutes plus tard, la Minerve quitte le quai…Je suis le dernier à la voir s’éloigner..Je crois même avoir fait un signe de la main à Jean Agnus…ou au sous-marin lui-même. Mais peut-être que c’est dans mon subconscient !!

     

Nous sommes maintenant le lundi matin 29 janvier 1968, peu après 7 h du matin, le mistral glacial s’est calmé. Des groupes d’ouvriers se forment, je m’approche d’eux : « Chef, j’ai vu des matafs ce matin….qui m’ont dit que la Minerve était perdue : elle n’est pas retournée à la base comme prévu ». Je ne sais quoi répondre, je ne saisis pas encore le tragique de la situation. Je n’ai jamais été confronté à de tels événements.

 

De l’escadrille de Missiessy, nous vient alors la confirmation qu’elle a perdu tout contact avec le sous-marin dans la matinée du samedi et qu’il est porté officiellement manquant depuis l’heure de son retour programmé en fin de soirée de ce même samedi

 

Dans l’après-midi, j’apprends que je vais embarquer en soirée, en compagnie d’ouvriers que je dois désigner, que je dois désigner,, sur une Gabare avec l’espoir d’avoir à mettre en action des organes que nous avons préparés pour ventiler en air frais l’équipage, si nous pouvons atteindre la Minerve. Mais je sais en mon for intérieur qu’il est vain de croire à la mise en œuvre de ces moyens de sauvetage.

 

Après une nuit passée à bord de la Gabare au large de Toulon, nous recevons l’ordre de retourner au port : l’espoir de retrouver la Minerve est écarté. Au débarquement de nos matériels, le mardi matin 31 janvier, nous comprenons que le sous-marin est définitivement perdu : l’attitude, pleine de retenue des personnels de l’escadrille et du chantier, ne nous trompe pas.  Nos pensées vont alors aux membres de l’équipage de la Minerve que nous avons côtoyés déjà depuis 3 ans, ainsi qu’à leurs familles.

 

On saura plus tard que la Minerve a implosé alors qu’elle atteignait accidentellement une immersion de 600 mètres environ, le 27 janvier, à 7h 59minutes 23 secondes, d’après des enregistrements.

 

A la détresse des sous-mariniers,il est de mon devoir, il est de mon devoir (à répéter) d’y associer la détresse des personnels du chantier de réparation qui ont été tous les jours en contact avec leurs camarades embarqués.

 

Adieu à nos camarades, la vague les a engloutis…

Pointe St Mathieu - Cinquantenaire disparition Minerve
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